Profanation du cimetière Cours de l’yser

Photo : Valérie Hubert-Cassant

Ce n’était peut-être pas un acte antisémite, mais cela a été vécu comme tel par les familles victimes. Argument présenté par notre avocate Sophie Clavel et repris par M° Dahan et la procureure de la République

Le compte rendu de l'audience du 07 juin 2022

Le procès – le compte rendu

Le 7 juin à 14 h, rencontre très rapide avec mon avocate, débordée comme d’habitude qui me dit « pas de bises quand je suis en robe… » Est présent aussi M° Dahan l’avocat du consistoire qui réclame à cor et à cri les statuts du consistoire à son secrétariat avant que l’audience ne commence, on comprendra pourquoi tout à l’heure.

La juge arrive et règle quelques affaires avant la nôtre, une prestation de serment et un huis clos.

Puis, enfin, notre affaire arrive. Le prévenu, s’assoit sur le banc des accusés, ses parents sont dans l’assistance.

La juge rappelle les faits :

« le 24 mai 2009 à 6h 50, la police et les pompiers interviennent pour libérer un homme qui a les jambes bloquées sous une stèle et qui crie. Ils découvrent treize tombes dégradées, des caveaux ouverts et des objets de culte éparpillés sur un rayon de 30 mètres dans le cimetière israélite cours de l’Yser à Bordeaux.

Il a un taux d’alcoolémie de 0,84 %.

La police procède à des constats et prend des photos que la juge montre à ses assesseurs, à la procureure et aux avocats.

Le cimetière est fermé la nuit et on n’a pas trouvé d’autres traces ADN que celles de M. Simon. Quand M. Simon est libéré et assis, il déclare au premier témoin, un pompier, qu’il est venu se recueillir sur la tombe de son grand-père. Au deuxième témoin, un autre pompier, il dit qu’ils sont venus à plusieurs et que lui seul est resté coincé.

Il n’y avait pas de tombe de votre grand-père, on est bien d’accord ? »

  • « Non, il n’y en avait pas »
  • Les pompiers qui l’ont entendu les premiers ont vu qu’il était alcoolisé mais ne l’ont pas entendu tenir de propos antisémites.

Après en garde à vue, il a tenu plusieurs versions. Avec ses copains de l’école de commerce, ils ont beaucoup bu et sont partis en boîte sur les quais de Bordeaux. Il n’a pas de souvenirs précis, est rentré en taxi chez lui, a vomi dans le taxi et a oublié son téléphone. Puis, il se souvient avoir reçu un coup sur la tête et s’être retrouvé coincé sous la tombe. Il n’a que des flashes comme souvenir. »

À la question de savoir ce qu’il a bu, il répond plusieurs verres de rhum et d’alcool fort. 4 à 5 verres.

« Ses copains, dans la boîte de nuit ont confirmé. Ils jouaient à un jeu « Picolo » où celui qui répond mal à une question doit boire un verre. Ses copains ont précisé que M. Simon était souvent ivre, les yeux vitreux. Il y a une asso à l’entrée de la boîte de nuit qui prend en charge les personnes alcoolisées et les ramène chez eux. Le taxi l’a laissé à l’entrée de sa résidence qui est située en face du cimetière. »

M. Simon répète qu’il n’a pas commis les dégradations, mais qu’il n’a pas de souvenirs exacts, voire pas du tout de souvenirs.

La juge vérifie ensuite si en garde à vue, on retrouve des traces des coups et blessures que M. Simon prétend avoir reçus. Son avocat précise qu’il y a bien reconnaissance de lésions traumatiques.

M. Simon insiste pour dire qu’il ne souvient de rien, quelques flashes « pour le cimetière, je n’ai rien fait, j’ai été frappé et mis sous la stèle de 100 kg. » Puis il reconnait boire souvent, trop, et quand il a bu, il vandalise. A oublié où il avait perdu son téléphone. Il n’est pas antisémite, catholique non pratiquant. La juge termine l’évocation des faits en montrant une vidéo où on le voit ivre, il ne tient pas debout.

La procureure ensuite interroge M. Simon.

Comment a-t-il réussi à grimper un mur haut de 3 mètres ?

Il est monté sur une borne électrique. Il se souvient d’être monté sur le mur, d’avoir entendu des bruits, mais de rien d’autre. C’est possible que ce soit lui, mais n’est sûr de rien.

Les témoins affirment que quand vous appelez au secours, vous êtes seuls, comment l’expliquez-vous ?

Il ne se souvient pas…

En conclusion, la procureure lui dit : « vous vous souvenez de ce qui vous arrange mais pas de ce qui vous dessert ? » Pas de réponse.

La juge : « avez-vous arrêté l’alcool ? »

– « Pas vraiment ».

La procureure demande son âge au moment des faits – 19 ans, rappelle que ses camarades ne sont pas surpris quand ils lisent dans la presse que le cimetière a été profané, ils pensent tout de suite à lui, ses parents pareil, n’ont pas été surpris. Demande pourquoi il a menti à ses secouristes, venir se recueillir sur la tombe de son grand-père qui n’est même pas mort.

La parole est à la partie civile.

Sophie Clavel représente 7 parties civiles, elle constate à regret que M. Simon continue à mentir. Regrette qu’il n’avoue pas. Elle veut bien tout entendre, mais, bon, il change sans arrêt de version. Elle n’a aucun doute sur sa culpabilité. Un résident, non, tous les témoins témoignent bien qu’on entendait que lui. Son histoire d’avoir entendu des bruits, de jouer aux héros, d’avoir été frappé par des inconnus ne tient pas un seul instant. On a vu que lui, on a entendu que lui. On a une heure et demi pendant laquelle on ne sait pas ce qu’il a fait. Cela suffit pour faire les dégradations dans le cimetière. Il a grimpé un mur de 3 mètres de haut, sauté de l’autre côté, démoli les tombes dont une stèle de 100 kg, c’est là qu’il a très bien pu se blesser. Il n’a pas de fracture, malgré le poids de la stèle sous laquelle il est resté coincé, c’est parce qu’il a bousculé la stèle et quand elle est tombée, il n’a pas pu la retenir.

Sophie Clavel rappelle que cela a un caractère particulier pour notre famille qui était la première à se constituer partie civile contre Papon. Que Jacqueline Matisson était une des quatre premières plaignantes. Elle rappelle le livre que j’ai écrit avec ma fille Alicia, (En fait Sophie et Alicia se connaissent depuis la maternelle et sont toujours restées amies).  Pour nous, cela signifiait que l’histoire se répétait et que même si le caractère antisémite n’est pas reconnu, cela avait été vécu comme tel par nous. Elle conclut en disant que la défense évoquera le fait qu’il était alcoolisé, mais que cela ne doit pas être considéré comme une circonstance atténuante.

Maître Jean-Jacques Dahan prend ensuite la parole.

« Je constate que M. Simon nie toujours et ne présente aucune excuse. Je suis très sensible au fait que ses parents soient présents. Il plane sur cette affaire une odeur nauséabonde à la hauteur de ce qui s’est passé. » Disant cela, il tourne vers moi ( je suis le seul représentant des familles victimes) et me regarde longuement. « On s’est moqué de nous comme par le passé, encore et encore. Peut-on accorder à ce jeune homme, un quelconque crédit dû au fait qu’il était alcoolisé ? En même temps, ce jeune homme arrive à commettre trois choses :

Un – Il a une attitude sportive. Il escalade un mur de 3 mètres de haut. Sacré gaillard, pas de doute là-dessus. Et quand il saute de l’autre côté, en bas, surement c’est là qu’il se blesse. Mais dire qu’il jouait les bons samaritains, non, c’est faux.

Deux – Il est très organisé dans ses gestes. Une stèle de 100 KG, il arrive à la faire vaciller. Au bout de trois au quatre va-et-vient, la stèle tombe. Comme le dit la bible le mort saisit le vif ! c’est la vengeance du mort. (bizarrement, c’est ce que je disais en rigolant à Henry, partie civile lui-aussi. M. Simon est mal tombé, il n’aurait pas dû s’en prendre à mémé. Connaissant son caractère, elle lui a fait payer le prix fort). Pendant de longues demi-heures, il reste coincé sous la stèle. C’est d’ailleurs ce que dira exactement le premier témoin.

Trois – le cimetière est grand, il sévit et dégrade les tombes dans un périmètre de 50 mètres. Et quand il est interpelé, il tient des discours très organisés, comme s’il décrivait ses propres gestes. Il s’invente des complices. Puis on dit qu’on a menti. Cela démontre une certaine clarté d’esprit.

Non, l’alcool n’est pas un objet absolutoire. Son avocat va plaider la relaxe à cause de cela. Ce n’est pas sa faute, mais celle de l’alcool, dira-t-il. Au contraire, l’alcool est une circonstance aggravante.

Je représente l’ACIG ( le consistoire) qui a été fondé en 1806 et ses statuts sont formels, elle a le droit de défendre ses intérêts matériels. Elle est propriétaire du cimetière et a payé le montant des travaux de réparation, soit 5400 euros plus une somme de 152 euros versés par M. Haddad directement. Il en demande le remboursement plus 2000 € de préjudice moral et 400 € pour les frais ce qui est peu vis-à-vis des frais de déplacement engagés.

La procureure prononce son réquisitoire.

Elle demande déclarer Bastien Simon coupable, elle espérait qu’il aurait prononcé des excuses. La violation de sépulture est un acte grave passible de 3 ans de prison. Comme cela a été dit, ce n’est pas un acte antisémite, mais cela a été vécu comme tel.

Quand à 5h45 les pompiers découvrent M. Simon coincé sous une stèle, ils viennent avec une échelle, aident M. Simon et à 7 h du matin, il a encore 0,84 g d’alcool dans le sang, c’est dire combien il en avait quand il a commis son crime. Les pompiers découvrent treize sépultures dégradées.  Il leur affirme qu’’il est venu se recueillir sur la tombe de son grand-père mais ses grands-pères ne sont même pas morts ! Puis, il enchaîne les versions différentes, implique un de ses amis qui fera 48 h de garde à vue alors qu’il n’était même pas sur les lieux. Il n’est pas frappé d’amnésie mais donne des versions mensongères. Il donne trop de versions, il n’est pas crédible. Elle aurait préféré qu’il reconnaisse les faits et présente des excuses. Il dit avoir été agressé à l’intérieur du cimetière pour justifier une de ses versions, mais a-t-il porté plainte pour agression ? non. Sa crédibilité est fortement compromise, c’est pourquoi, vous le condamnerez sévèrement. Ses copains s’inquiètent, ils ne sont pas contents, ils ont l’habitude et quand ils apprennent que le cimetière israélite a été profané, quand le lendemain la presse en parle, ils font de suite le rapprochement. Ils savent parfaitement que c’est de lui qu’on parle.

* 18 mois de prison dont 12 mois avec sursis, les 6 ferme avec un aménagement

* Réparation des préjudices

* Interdiction de paraître dans un ( ou ce ?) cimetière

* Obligation de travailler à la réparation

* Obligation de soins pour son alcoolisme

* 1 stage de citoyenneté pour rappeler la loi

Et elle conclut ainsi : « la violation de sépulture, ce sont des faits graves et même si le caractère antisémite n’est pas avéré, cela a été vécu comme tel par les victimes. » Merci à Sophie Clavel d’avoir introduit cette notion.

M° Queyrol pour la défense défend son client, assez habilement d’ailleurs et explique pourquoi selon lui, même si les versions de son client diffèrent, il voit un chemin de vérité. Il comprend combien, nous attendions cette audience, mais son client aussi. Il a entendu les éléments à charge, il va donner les éléments à décharge. Je n’ai pas commis ces actes, cela revient tout le temps. Quand je suis entré dans le cimetière, je n’étais pas seul. Et de cela, il n’a jamais dérogé. Les éléments à décharge : La stèle était trop lourde pour être renversée par une seule personne. Une porte éloignée dans le cimetière a été retrouvée ouverte, les vrais auteurs ont pu passer par là. Aucun ADN n’a été retrouvé. Une des parties civiles affirme que la plaque sur la tombe de sa famille a disparu, on ne l’a pas retrouvée.

Son client n’a pas le profil du tout, il n’est pas antisémite, etc.

Information reçue le 08 juin 2022 par notre avocate Sophie Clavel

Cher Jean-Marie,
Dans le prolongement de notre conversation téléphonique de ce jour, je te confirme que Monsieur Bastien SIMON  a été reconnu coupable des faits de violation de sépulture, tombeau, urne cinéraire ou  monument édifié à la mémoire des morts ; faits commis le 24 mai 2019 à BORDEAUX.
Il a été condamné à une peine de 10 mois de prison assortie en intégralité d’un sursis simple, c’est-à-dire que la totalité de la peine de prison est suspendue. S’il commet une nouvelle infraction, cette peine de prison pourra être mise à exécution en totalité ou partiellement.
Il a également été condamné à exécuter un stage de citoyenneté.
Les scellés ont été confisqués (son téléphone portable notamment).
Concernant les constitutions des parties civiles : elles ont toutes été jugées recevables.
Au titre du préjudice moral, chacun des membres de ta famille a obtenu 200,00€ soit un total de 1.400,00€.
Au titre du préjudice matériel, la somme de 1.240,00€ a été allouée par le tribunal en remboursement des frais exposés pour la remise en état des tombes.
Au titre de l’article 475-1 du Code de Procédure Pénale (CPP), Monsieur SIMON est condamné à verser la somme de 1.000,00€. (Il s’agit des frais d’avocat)
Concernant les autres parties civiles défendues par mon confrère, Jean-Jacques DAHAN :
Il a été alloué la somme de 500,00€ à chacune des parties civiles, soit 1.500,00€ au total puisqu’elles sont trois: Madame ALLOUCH ; Madame AOUIZERATE, Monsieur HAZANE.
Monsieur HAZANE a également obtenu la somme de 152€ au titre de son préjudice matériel.
Pour mémoire, mon confrère sollicitait la somme de 2.000,00€ par personne.
Enfin, chacune des parties civiles a obtenu 300,00€ au titre de l’article 475-1 du CPP. (900,00€ au total)
Pour le consistoire : la somme de 200,00€ lui a été attribuée au titre du préjudice moral et la somme de 3.525€ au titre du préjudice matériel, outre 400€ au titre de l’article 475-1 du CPP.
Je ne manquerai pas de t’adresser le jugement correctionnel dès que j’en serai destinataire.
J’ai pris attache, ce jour, avec l’avocat de la défense, Maître QUEYROL, afin de savoir :- Si son client entend relever appel ;- Si son client peut procéder au paiement des sommes spontanément.
Concernant l’appel : je t’informe que Monsieur SIMON bénéficie d’un délai de 10 jours pour relever appel. 
Pour l’instant, son avocat n’est pas en mesure de me confirmer si monsieur SIMON choisira ou non, cette voie. Il pense toutefois qu’il souhaite en terminer avec cette affaire et qu’il est peu probable qu’il relève appel.
Concernant l’indemnisation des parties civiles : la famille de Monsieur SIMON proposera probablement un échéancier mais ses parents et Monsieur SIMON, devraient honorer le paiement de ces sommes sans difficulté.
Je te laisse le soin d’informer ta famille de cette décision. J’ai toutefois discuté avec Alicia ce matin.
Je me tiens à ton entière disposition pour que nous discutions de l’audience et de la décision.
Bien Amicalement,

SOPHIE CLAVEL AVOCAT 

Maitre Sophie Clavel
Photo : Valérie Hubert-Cassant

La suite de cette triste affaire qui trouve une conclusion le 7 juin 2022 sera publiée dans mon prochain livre que je suis en train d’écrire sur Esther Fogiel.

15 Mars 1921, premières explications de mon avocate.

Cher Jean-Marie,
Comme je te l’avais indiqué, je suis allée consulter la procédure au greffe de l’instruction de Bordeaux.
Le mis en cause, Bastien SIMON, né le 16 janvier 2000 à Rennes, (21 ans), étudiant, n’a aucun antécédent judiciaire. Son casier judiciaire ne comporte aucune mention.
Placé en garde à vue et interrogé par les gendarmes, Monsieur SIMON conteste intégralement avoir commis des faits de dégradation de sépultures.
Plus tôt dans la soirée du 24 mai 2019, Monsieur SIMON s’est rendu avec des amis au « Théâtro », une discothèque située à Bordeaux. Le groupe d’amis avec lequel il est sorti atteste qu’ils ont consommé de l’alcool et que Monsieur SIMON était ivre. Il ressort des investigations qu’il avait consommé des alcools forts et en grande quantité.
Lors de son audition, Monsieur SIMON a déclaré qu’il avait entendu du bruit, des cris, dans le cimetière, qu’il avait alors enjambé le mur pour tenter d’empêcher des personnes de détériorer les tombes.
Il précise à propos des dégradations qui concernent ta famille :
« La stèle est en face de moi, elle ne bascule pas, elle glisse du bas, pour moi c’est les personnes qui l’ont poussée,
je ne suis même pas sûr que ce soit elles n’ont plus, qui aient poussé cette stèle, mais cela me paraît trop pour que je puisse la pousser seul ».

Photo : Valérie Hubert-Cassant

Il expliquera également avoir reçu un coup de poing au menton, mais ne pas être en mesure d’identifier son agresseur.
Au regard de ses déclarations et de l’absence de témoin direct, on ne peut pas exclure une relaxe. Loin de moi l’idée de l’affirmer, mais c’est ce que devrait plaider son conseil. Pour autant, si le juge d’instruction a retenu la violation de sépulture à son encontre (cf. l’avis de fin d’information), c’est en raison de plusieurs éléments troublants.
D’abord, ses déclarations en garde à vue, se contredisent avec les premières, faites aux pompiers, lorsqu’ils sont venus le délivrer de l’emprise de la statue. Pour mémoire, il avait indiqué être venu se recueillir sur la tombe de son grand-père. Il aurait perdu en crédibilité lorsque les sauveteurs auraient constaté les dégradations sur les
tombes avoisinantes, sur lesquelles le blessé ne pouvait s’expliquer.
Ses explications manquent de constance, de cohérence et de vraisemblance, ce qui ne plaide pas en sa faveur.
Toutefois, compte tenu de sa forte alcoolisation le soir des faits, il n’est pas impossible que lui-même ne se souvienne pas avoir commis ces dégradations. Ensuite, ses amis n’avaient pas l’air étonné qu’il ait pu commettre des actes de vandalisme sous l’emprise de l’alcool (notamment des sms échangés entre eux).
Comme je te l’ai indiqué depuis le départ, je ne crois pas que ces dégradations aient une quelconque connotation antisémite.
C’est pourquoi le Juge d’Instruction n’a relevé que la violation de sépulture à son encontre.

Photo : Valérie Hubert-Cassant

Les investigations menées scrupuleusement pas le magistrat (cette affaire étant sensible) n’ont pas mis en évidence que Monsieur SIMON avait des lectures, des propos, des recherches internet, ambivalentes ou sujettes à caution, sur un quelconque racisme en général.
Il est possible qu’il ait un penchant pour le vandalisme lorsqu’il boit, mais ses actes n’étaient pas motivés par un quelconque tempérament antisémite.
Ce constat n’enlève rien au caractère désagréable des faits qui lui sont reprochés. De plus, son comportement induit un préjudice financier et moral. Ta famille a été suffisamment malmenée par le passé, pour que leur repos ne soit pas troublé de la sorte.
A mon sens, ce dossier devrait être jugé d’ici la fin de l’année ou au plus tard, au premier trimestre 2022. Je demande la copie du dossier pénal, afin que tu puisses en prendre connaissance.
Je n’ai pas le droit de t’en délivrer un exemplaire, toutefois, je pourrais te laisser la lire, ainsi que les autres membres de ta famille, parties civiles.
Ce sera l’occasion pour moi de venir vous voir à Fronton et de découvrir votre nouvelle maison.
Je me tiens à ta disposition pour de plus amples informations.
Bien amicalement.
Sophie CLAVEL
Avocat à la Cour

Peut être une image de texte qui dit ’L'HISTOIRE EST UN ÉTERNEL RECOMMENCEMENT’
Photo : Valérie Hubert-Cassant

L’histoire bégaye, un matin de janvier, un dimanche, si mes souvenirs
sont bons, le téléphone sonne et le président du Consistoire m’annonce que le cimetière israélite de Bordeaux a été vandalisé.
Parmi les tombes profanées, celles de mes grands parents ont été cassées. Ma grand mère a perdu pendant la guerre en déportation ses 4 sœurs, leur mari, leurs enfants et sa maman…
Mon grand père a perdu pendant la guerre en déportation son fils et son ex femme…
Ma grand mère a fait partie des quatre premières parties civiles, celles qui ont déclenché l’affaire Papon… Elle s’est constituée partie civile sans aucune hésitation.
Ma grand mère est morte, inculpée par Papon de dénonciation calomnieuse (voir mon témoignage et mon dialogue avec Maître Varault, l’avocat de Papon, devant la Cour d’Assises), ma grand mère a été rendue malade, par un juge, qui voulait « se payer les Juifs de l’Affaire Papon, honte à lui !» et qui a envoyé deux gendarmes lui remettre son inculpation. Je n’ose même pas décrire l’état dans lequel se trouvait ma grand mère devant une telle goujaterie.


Les rescapés de ma famille ont toujours eu une peur panique devant des policiers ou des gendarmes, allant jusqu’à ne pas pouvoir mettre les pieds dans un commissariat.
Ma grand mère aspirait au repos éternel.
Le juge ne voulait surtout pas qu’on dise que cette profanation avait un caractère antisémite, mon avocate a insisté sur ce point, ce n’est pas un acte antisémite, ma fille, une amie d’enfance de Sophie Clavel, mon avocate, penche plutôt dans son sens.
Mais comment dire que profaner ou vandaliser un cimetière israélite, même si l’auteur est sous l’emprise de l’alcool n’est pas un acte antisémite ? C’est un jeune étudiant d’une école de commerce de Bordeaux.

Photo : Valérie Hubert-Cassant

J’ai alerté avec le vénérable de ma loge, à sa demande, je dois le dire – merci à lui, d’ailleurs , le conseil de l’ordre du Grand Orient de France pour qu’il réagisse, le conseiller local, ami d’Esther Fogiel soutenait ma demande. Las, ils sont restés sur cette version : cela n’était pas un acte antisémite. J’avoue que je ne comprends toujours pas cette forme de silence, plus proche à mon avis de la lâcheté coupable qui laisse la bride sur les auteurs d’actes racistes, négationnistes, révisionnistes ou antisémites.
J’ai décidé de me constituer partie civile avec ma mère, mes cousins, ma femme, mes enfants pour que n’arrive pas un jour, où cet individu se présente aux parties civiles (nous et le consistoire israélite) avec des excuses, demande pardon et se retrouve non condamné par la justice française. Ne serait ce qu’au nom de la souffrance qu’a subie ma grand-mère, je dirai NON ! ni excuses, ni pardon !
Que signifie cette société qui laisse ses enfants s’en prendre aux morts ?
Quelle civilisation a autorisé cette forme de barbarie ?

La laïcité n'est pas une opinion, c'est la liberté d'en avoir une